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Texte zur Mallarmé-Rezeption
Texte zur Theorie und Rezeption des Symbolismus
[577] En parcourant la collection des Entretiens politiques et littéraires, une des plus intéressantes revues de la génération symboliste, mon attention fût attirée par une étude signée Jean Thorel. Cet article, paru en septembre 1891, s'intitule: les Romantiques allemands et les Symbolistes français. C'était le temps où les critiques officiels affichaient un beau dédain pour les manifestations poétiques contemporaines. Brunetière seul venait de résumer avec clairvoyance et impartialité les principes esthétiques de la jeune école, dans un remarquable article de la Revue des Deux Mondes qui forma depuis l'avant-dernier chapitre du tome II de l'Évolution lyrique.
S'en tenant aux conclusions de l'éminent critique, M. Jean Thorel se propose de montrer "la ressemblance frappante que présente le mouvement symboliste avec un mouvement littéraire qui eut un retentissement considérable en Allemagne à la fin du siècle dernier et au commencement de celui-ci". L'auteur compare l'esthétique du romantisme allemand aux principes d'art enclos dans les uvres de nos modernes lyriques, et dégage les points communs entre ces deux attitudes littéraires. Il est étrange que cette étude qui, étant donné la période troublée où elle parut, atteste une lucidité de jugement peu commune et une sage modération, – n'ait pas été plus souvent citée et commentée. Nul autre que Jean Thorel, en [578] effet, n'a tenté un rapprochement qui me semble s'imposer. Je voudrais, puisque l'occasion se présente, marquer à mon tour l'étroit rapport qui unit dans la même conception lyrique les poètes de la génération de Novalis et nos symbolistes français.
§
Les symbolistes diffèrent de Hugo et de ses disciples précisément dans la mesure où ils se rapprochent des contemporains de Novalis. C'est avouer qu'entre le romantisme français et le romantisme allemand il n'existe guère que des oppositions et la plupart fondamentales. Aujourd'hui que l'histoire des littératures comparées a fait de grands progrès, on commence à s'en rendre compte.
Les romantiques français n'ont connu ni les romantiques allemands ni le romantisme allemand; je veux dire ni les hommes d'outre-Rhin ni leurs doctrines.
De fait, pour la génération de 1830, quels sont les romantiques allemands? Gœthe et Schiller. Or, ni l'auteur de Werther ni celui des Brigands ne font partie de la période qu'on nomme communément le romantisme allemand. Ils appartiennent tous deux à cette époque de transition connue sous le nom de Sturm und Drang, qui réagit contre le rationalisme, l'Aufklärung, et qui prépare le vrai romantisme. Aussi bien Gœthe et Schiller sont des classiques et la génération allemande de 1795, après les avoir pris pour modèles, les abandonne.
Cette génération de 1795 se compose principalement de Novalis, de Tieck, des Schlegel. Ce brillant triumvirat se met d'abord à la remorque de Gœthe. Le Wilhelm Meister de celui-ci eut une profonde influence sur l'auteur d'Henri d'Ofterdingen. Influence d'ailleurs brève. Les jeunes romantiques ne tardent pas à se sentir mal à l'aise avec la grandeur un peu froide de Gthe l'Olympien. Novalis finit par traiter Wilhelm Meister de "Candide dirigé contre la poésie". La plupart des uvres de Gœthe apparaissent aux romantiques allemands douées des qualités "qui caractérisent les marchandises des Anglais, très simples, élégantes, commodes et durables". Si Wilhelm Meister est qualifié "d'évangile d'économie politique", les poésies de Schiller sont, à leur tour, appelées "de jolies superfluités".
[579] C'est que l'idéal d'art des jeunes romantiques d'outre-Rhin est fort élevé. Tout en reconnaissant à Gœthe et à Schiller des qualités poétiques éminentes, ces réformateurs intransigeants aspirent à un lyrisme plus évocateur, plus subjectif, plus inspiré et, pour tout dire, plus intuitif. Entre la réalité et la poésie, pour Novalis, en qui s'incarne tout le romantisme, il n'est pas de différence. Plus une chose est poétique, déclare-t-il, plus elle est vraie. La poésie est le réel absolu. "Die Poesie ist das æcht absolut Reelle. Dies ist der Kern meiner Philosophie. Je poetischer, je wahrer." Cette conception de la poésie repose elle-même sur une doctrine métaphysique et une critique de la connaissance.
Ce qui caractérise en effet le romantisme allemand, c'est l'influence exercée par la philosophie sur les lettres. En 1794, Fichte professe et publie sa Théorie de la science. Cet ouvrage est une date dans l'histoire du romantisme. Les jeunes poètes jusque-là oscillent entre Gœthe et Schiller. Mal satisfaits du lyrisme un peu didactique et purement intellectuel de l'un et de l'autre, ils trouvent dans la Wissenschaftslehre la synthèse de leurs aspirations inconscientes. Fichte fut le Bergson de sa génération.
Par son idéalisme absolu et suggestif, la Wissenschaftslehre libère le moi de toutes les contraintes, de toutes les entraves contingentes. La nature, les choses, c'est l'esprit qui s'objective en prenant conscience de lui-même, mais la "chose en soi" niée par Kant, c'est le moi subjectif, créateur de tout, souverain maître. Par ainsi le moi, la personne <acquièrt> une puissance illimitée. "Ce qui est primitif, irréductible, absolu, c'est le Moi, déclare M. Spenlé (1), qui paraphrase Fichte; le monde sensible n'existe qu'autant qu'il s'oppose à ce moi et le limite."
Cette métaphysique qui biffe résolument la réalité extérieure et qui donne au moi créateur une autonomie absolue fut accueillie avec enthousiasme. "Qu'on suive, déclare M. Rouge (2), l'évolution de Frédéric Schlegel le critique, de Baader le physicien, de Novalis le poète, ou de Schleiermacher le théologien, on les voit tous tourmentés d'une même soif de con[580]naissance totale, absolue, définitive." La formule de la nouvelle esthétique était trouvée. Il s'agissait, pour la jeune génération, avide de poésie, de mettre à la place des vieux concepts rationalistes un idéalisme intérieur, un moi profond qui porte en lui sa foi, sorte de démiurge capable de tout éclairer de sa lumière propre.
La doctrine de Fichte mettait aussi en déroute le vieil intellectualisme abstrait et proposait une nouvelle théorie de la connaissance, très féconde en aperçus lyriques de toute nature. Fichte, avec Jacobi, distingue entre l'entendement (Verstand), faculté improductrice, inerte de l'esprit, déclare l'auteur de la Doctrine de la Science, réceptacle de tout ce qui est et sera déterminé par la raison, – et la raison (Vernunft), "sorte de faculté métaphysique, suprasensible et supra-intellectuelle", qui se rapproche fort de ce que M. Bergson nomme intuition.
A leur tour, Novalis et les romantiques allemands marquent quelle différence de nature et non plus de degré sépare l'entendement discursif ou faculté d'assembler des rapports et l'activité créatrice de l'esprit. "Kant n'est plus à la hauteur", écrit l'auteur des Hymnes à la Nuit, et il ajoute: "Il ne serait pas impossible que Fichte fût l'inventeur d'une manière toute nouvelle de penser qui n'a pas encore de nom dans la langue courante. Peut-être l'inventeur lui-même n'est-il pas sur son propre instrument l'exécutant le plus habile et le plus ingénieux, encore que je n'affirme pas la chose. Mais il est vraisemblable qu'il se rencontrera des hommes qui sauront mieux "fichtiser" que Fichte" (die weit besser fichtisiren werden, als Fichte).
En parlant ainsi Novalis songeait à lui-même et à ses amis qui cherchaient l'essence de la poésie dans l'exaltation du moi et l'intuitionnisme ou idéalisme intégral. Bientôt, en effet, la philosophie protestante de Fichte, son retour à un rationalisme abstrait ne satisfont plus les jeunes romantiques. On se tourne alors vers Jacobi et Schelling, dont la doctrine prête davantage aux applications lyriques. Les poètes de 1795 ne se contentent pas de tourner en ridicule ce que Novalis nomme "l'intellect pétrifiant"; ils remplacent le mot Vernunft par celui de Gemüth. Au centre du moi ils installent le cur, avec tout ce que ce mot comporte de sens intuitif et émotionnel. [581] Parti de la philosophie de Fichte, Novalis en vient à diviniser le moi esthétique, à en faire la substance de toute réalité. "Son génie poétique exige que le fond de la Nature soit Génie et Poésie", déclare M. Delacroix (1). Entendue de la sorte, la poésie, émanation du moi subjectif et sentiment pur, doit nous mener plus près de l'âme des choses que ne le fait l'intelligence constructive.
Cet idéalisme transcendant, de caractère émotionnel et diffus, ce subjectivisme poétique, cet intuitionnisme lyrique est la base de l'esthétique romantique d'outre-Rhin. Et l'on voit à présent quel abîme sépare nos poètes de 1830 des artistes de 1795.
Outre que le romantisme français n'a pas connu les hommes et les uvres d'outre-Rhin, il a totalement ignoré les doctrines du romantisme allemand. Sans doute l'école de 1830 exalte aussi l'individualisme et le sentiment poétique, mais il manquera toujours à l'esthétique de Hugo ce fondement métaphysique qui constitue l'originalité du romantisme allemand. Lorsque Novalis parle du sentiment, il entend une lumière supérieure à la clarté de la raison, capable d'éclairer les profondeurs de notre moi absolu et de faire rayonner en notre esprit les plus hauts sommets de l'Etre. Il s'agit là d'une faculté nouvelle, source de connaissance immédiate, dont le fondement est métaphysique et qui a pour but de révéler l'inconnaissable. Cette théorie fait le fond de la philosophie de Jacobi.
Au contraire, lorsque Hugo parle du sentiment, il entend ce mot dans un sens beaucoup plus simple et purement affectif. Les deux romantismes combattent l'un et l'autre au nom de la nature, mais pour les Allemands la nature c'est l'intuition et l'âme; pour Hugo il ne s'agit que d'une réaction contre l'idéal classique et de faire entrer dans l'art le concept de liberté. Les romantiques français n'ont jamais cherché à étayer leur esthétique sur un système spéculatif ou sur une théorie de la connaissance. Ils traduisent le mot sentiment par celui d'imagination et ne s'efforcent pas d'identifier dans la même substance l'idéal et le réel. Le sentiment n'est pour eux que l'expression de la fantaisie individuelle, le pouvoir [582] de suivre librement les caprices de l'esprit et d'en marquer les arabesques.
La répugnance bien connue des Français pour toute spéculation métaphysique un peu poussée interdisait à nos poètes de 1830 la compréhension de l'esthétique allemande. À ce propos, le livre de Mme de Staël apparaît une exception dans l'histoire littéraire du début du XIXe siècle. Encore que De l'Allemagne soit un livre de vulgarisation et qu'on puisse le comparer aux interviews d'un Jules Huret, par exemple, cet ouvrage, beaucoup trop fort, bien trop riche d'idées spéculatives, ne pouvait être assimilé d'un trait par les cerveaux primesautiers de nos poètes. Le livre impressionna par les détails, bien plus que par le fond même des théories exposées. Nos romantiques français ne virent dans le mouvement littéraire allemand que l'exaltation du gothique et qu'un retour enthousiaste aux légendes du moyen-âge. Toute la partie essentielle, c'est-à-dire la philosophie transcendante du moi, la méthode intuitive et l'idéalisme lyrique leur échappa.
Par romantisme allemand le cénacle de Hugo entend Gthe et Schiller qui ne sont plus romantiques, encore les connaît-on fort mal. On a des notions, il est vrai, de leur théâtre, et c'est bien sur notre théâtre que l'influence allemande se fait sentir. Nous sommes, à ce point de vue, créanciers d'un Schiller, vulgarisé à cette époque par Camille Jordan. Mais que dire de Faust que Benjamin Constant appelle une "dérision" et que Mme de Staël nomme "un rêve"? Quant à la poésie allemande, elle est entièrement ignorée.
Ainsi donc, entre 1820 et 1830, comme le remarque M. Texte (1), la littérature allemande est moins pour la France un objet d'imitation qu'un instrument d'émancipation. On n'entend rien à l'esprit germain, mais on sent obscurément que cette littérature étrangère apporte des sentiments nouveaux; aussi l'aime-t-on plus qu'on ne la comprend.
Ce n'est qu'après 1830 que nous acquérons quelques notions de littérature comparée et qu'on lit la poésie lyrique allemande, grâce à Henri Heine. Or, ce dernier avait plus de goût pour les Français que pour ses compatriotes, aussi les a-t-il franchement calomniés, et n'a-t-il offert à nos poètes qu'une caricature grossière du premier romantisme.
[583] Un seul Allemand a agi sur le cénacle de Victor Hugo: Hoffmann, qui ne fait d'ailleurs pas partie de la génération de Novalis. Cet homme étrange, dont la vie s'était écoulée entre l'alcool et le rêve, semblait le digne fils de cette Allemagne qu'un critique a appelé la patrie des hallucinations. "Mieux que tout autre, écrit M. Texte, son inquiet génie répondait à l'idée que se faisaient les Nerval, les Musset, de l'inspiration poétique. Personne n'avait mieux réalisé l'idéal du poète purement sensitif, de celui qui passe sa vie dans une perpétuelle oscillation de l'ironie au mysticisme, du sarcasme au baquet de Mesmer (1)." Ces qualités ne pouvaient manquer d'enchanter nos poètes, alors épris de fantastique; aussi peu de livres ont eu chez nous, à cette époque, la vogue des Contes d'Hoffmann.
Somme toute, le romantisme français ne doit presque rien au véritable romantisme allemand. Il lui a emprunté son goût pour l'étrange, son amour du gothique et de la légende, mais là s'arrêtent ses emprunts. Les poètes de 1795 demeurèrent inconnus en France. Jamais les contemporains de Hugo ne se seraient entendus avec Novalis, disciple de Fichte et de Schelling, et n'auraient accepté cette idée de l'auteur des Hymnes à la Nuit: "La distinction de la philosophie et de la poésie n'est qu'apparente, et à leur commun préjudice." Les deux esthétiques ne se compénètrent pas.
§
Notre génération poétique de 1885, sans avoir connu à fond le romantisme allemand, en a eu pourtant des notions exactes. C'est à cette époque seulement qu'il faut chercher l'influence exercée en France par Novalis et ses contemporains.
Les romantiques allemands, comme nos modernes symbolistes, luttent avec la même énergie contre un rationalisme étroit et un positivisme anti-poétique. Au sortir de l'atmosphère étouffante du XVIIIe siècle et du matérialisme de l'Aufklärung, les jeunes esprits sentaient le besoin de s'aérer, de respirer plus librement. L'intellectualisme avait réduit sous sa loi tous les élans de l'âme; le cur ne devait pas tarder à prendre sa revanche. De même, en France, le naturalisme d'un Zola et le positivisme parnassien semblent vouloir tout enva[584]hir et nous déshabituer du lyrisme pur. La réforme opérée par les symbolistes dans le domaine poétique fut d'abord une réaction très vive contre l'idéal, un peu bas, en vogue à la fin du XIXe siècle. Ceci est trop évident et connu pour qu'il soit nécessaire d'insister. Ajoutons toutefois que le parallélisme qu'on observe dans les tendances intellectuelles de la période romantique se retrouve aussi de nos jours. La réaction contre l'intellectualisme se produit en Allemagne non seulement dans la poésie, mais encore dans la philosophie avec Fichte, Schelling et Jacobi. Chez nous on observe cette même direction de l'esprit dans tous les ordres de l'activité cérébrale, dans les sciences abstraites, par exemple, avec un Poincaré, dans les sciences naturelles avec un Houssaye, dans la métaphysique et la psychologie avec un Boutroux et surtout un Bergson, le Fichte de notre génération, répétons-le.
Le fondement esthétique du symbolisme repose, comme celui du romantisme allemand, sur les assises de l'idéalisme transcendant. On se rappelle les principes mille fois exposés du lyrisme contemporain: la nature est un état d'âme; nous sommes des réceptacles de sensations et d'images que nous projetons au dehors de nous par des intuitions immédiates; les choses nous intéressent moins en elles-mêmes que selon les vibrations de notre conscience à leur occasion; un paysage est notre moi qui chante de certaine façon, etc Dans son article M. Jean Thorel a bien noté cette influence de l'idéalisme, entendu dans son sens allemand, et non plus comme une vague aspiration de l'au-delà, sur notre génération. "Ce que la Revue Wagnérienne et la Revue Indépendante, écrit-il, appelaient philosophie et littérature wagnériennes, ce n'était autre chose que l'idéalisme fichtéen." La Revue Wagnérienne en effet, – dont il serait curieux de dépouiller la collection – eut sur les poètes symbolistes une grande autorité, grâce au talent si averti de M. Téodor de Wyzewa. De plus, les deux plus authentiques ancêtres du symbolisme, Villiers de l'Isle-Adam et Stéphane Mallarmé, ont toujours été de purs fichtéens. "M. Mallarmé, écrivait M. de Wyzewa, admet la réalité du monde, mais il l'admet comme une réalité de fiction. Pour lui, la nature, avec ses chatoyantes féeries et les sociétés humaines effarées, n'est qu'un rêve de l'âme, réel certes, mais tous les rêves ne sont-ils point réels, et notre âme est-elle [585] autre chose qu'un atelier d'incessantes fictions, souverainement joyeuses lorsque nous avons conscience que c'est nous qui les créons?" D'autre part, Claire Lenoir et Axel sont pleins de phrases fichtéennes telles que: "Dieu n'est que la projection de mon esprit, comme toutes choses; je ne puis sortir de mon esprit Tu possèdes l'être réel de toutes choses en ta pure volonté... Tu n'es que ce que tu penses... Tu crois apprendre, tu te retrouves; l'univers n'est qu'un prétexte à ce développement de toute conscience." "Pour qui sait, ajoute M. Jean Thorel, que toute l'uvre de Villiers de l'Isle-Adam, comme celle de M. Stéphane Mallarmé sont en chaque instant pénétrées de ce sentiment que nous venons de leur voir, il sera facile de découvrir des traces continuelles de l'importance qu'eut leur autorité sur la plupart des symbolistes." Rappelons aussi pour mémoire que la première traduction des uvres de Novalis est due à Maeterlinck et que dans le Trésor des Humbles se trouve un brillant commentaire de l'idéalisme allemand.
Cet idéalisme dans les uvres symbolistes n'est plus un simple élan sentimental, mais revêt bien le caractère d'une doctrine définie, qui repose, comme chez Fichte et ses disciples littéraires, sur une théorie de la connaissance. À côté de l'intelligence discursive, les poètes contemporains admettent, de façon plus ou moins consciente, une faculté lyrique ayant son activité propre et permettant d'avoir de l'univers une sorte de vision centrale et directe. Cette faculté, que les Allemands nomment Einfühlung et qui correspond à ce que Bergson appelle intuition, permet au poète de penser d'un coup tout son poème, de s'intérioriser dans l'objet de son chant, jusqu'à ce que l'expression de ce chant soit son âme même vécue dans le temps de sa conscience.
D'autre part l'objet de la poésie pour les romantiques allemands, comme pour les symbolistes, est d'exprimer l'inexprimable, tous les rapports secrets qui unissent les paysages à une vie d'homme, les correspondances intimes entre les objets divers qui nous entourent et notre moi, l'ambiance mystérieuse où baignent nos sentiments, l'harmonieux concert et les polyphonies multiples qui se jouent dans le silence de nous-mêmes. Novalis se proposait précisément dans ses Hymnes à la Nuit de chanter ce qui échappe à toute représentation. Les [586] symbolistes, de même, ont voulu dire la réalité qui se dérobe derrière les phénomènes, les modulations que le sentiment de l'inconnaissable déchaîne en nous.
Rendre ainsi le moi à la "volupté vagabonde du rêve", c'était de part et d'autre donner d'abord comme objet à la poésie la poésie même, la poésie dépouillée de tout ce qui n'est pas elle, l'art oratoire, l'éloquence, etc pour n'accueillir que des pensées et des sentiments purement lyriques et repousser une esthétique naturaliste – je ne dis pas naturiste – c'est-à-dire étroite, incomplète, trop plastique, trop formelle. C'était aussi parler un langage éminemment suggestif et évocateur. Les romantiques reprochaient à Gœthe et à Schiller de couper les ailes au rêve, de l'enfermer dans des concepts rigides, de perdre en profondeur, comme l'écrit M. Jean Thorel, "tout ce qu'on gagne en délimitation", de revenir vers le fini, alors que le devoir du poète est de chercher l'infini. Le grief fondamental des symbolistes contre l'école parnassienne est qu'elle ne parvient que rarement "à rien suggérer au-delà de ce qu'elle dit, ce qui la met par conséquent dans l'impossibilité d'exprimer", le mystère des bois, la joie des matins clairs, le parfum particulier de tel sentiment, la vie latente de l'âme universelle.
D'où ici et là un désir légitime de combinaisons harmonieuses plus fines, plus discrètes, plus matérielles. M. Jean Thorel écrit avec beaucoup d'à propos:
... L'école romantique allemande fut maintes fois appelée école musicale par les critiques d'outre-Rhin, qui ne manquèrent pas de relever, comme il nous serait facile à nous-mêmes de le faire pour les symbolistes, l'abondance d'uvres dont le titre est emprunté aux termes en usage dans la musique. Et sans doute faut-il croire que ces préoccupations ont prêté un charme réel à l'uvre des romantiques allemands puisque le critique Hettner, que ses préférences personnelles ont engagé à juger le groupe romantique avec un peu de sévérité s'est vu contraint, voulant être impartial, d'avouer que tout justement à cause de cette base musicale sur quoi elle se fonde, cette poésie vient faire vibrer nos curs d'une manière saisissante et si profonde, si gracieusement rieuse ou si émouvante, qu'on a peine à imaginer que puisse jamais parvenir à un résultat aussi intense une poésie plus plastique, fût-ce même celle des plus grands poètes."
[587] De la musique encore et toujours
Que ton vers soit la chose envolée...
s'écria Verlaine sûr d'être entendu de sa génération. Un lyrisme ainsi compris, une poésie d'états d'âme où s'unissent les rapports secrets du sensible et de l'intelligible, où l'on veut "atteindre l'essence dont les manifestations se jouent à la surface des choses", réclament des modes d'expression plus souples et variés, un langage moins objectif, des termes, si j'ose dire, plus immanents, des images entièrement recréées qui clichent sans la figer la sensation. D'où les réformes métriques tentées par les romantiques allemands et les symbolistes. M. Spenlé, dans son très érudit ouvrage sur Novalis, fait remarquer que le troisième en entier et le début du quatrième des Hymnes à la Nuit sont écrits en prose rythmée. De cette prose rythmée, ajoute le critique (1), on voit se dégager peu à peu une forme lyrique différente: le vers libre. Et M. Spenlé nous cite une très intéressante lettre de Novalis adressée à Schlegel en janvier 1798. Novalis rêve d'un rythme plus malléable et d'une métrique plus subtile.
La poésie, dit-il, semble ici se relâcher de ses exigences, devenir plus docile et plus souple. Mais celui qui tentera l'expérience dans ce genre s'apercevra bien vite combien cela est difficile à réaliser sous cette forme. Cette poésie plus large (diese erweiterte Poesie) est précisément le problème le plus élevé du compositeur poète, un problème qui ne peut être résolu que par approximation et qui est déjà du domaine de la poésie supérieure... Ici s'ouvre un champ illimité, un domaine vraiment infini. On pourrait appeler cette poésie supérieure: la poésie de l'Infini.
Les symbolistes ont, à leur tour, cherché un rythme en adéquation avec leur esthétique, "un rythme basé réellement sur les sensations auditives produites par la lecture normale du vers, et une combinaison plus consciente, sinon plus savante, des effets d'harmonie qu'on ne remarquait guère jusqu'ici qu'à la rime, et que pourtant il serait facile d'analyser dans leur belle complexité chez les grands poètes antérieurs qui les ont produits, tous d'instinct et par la seule vertu de leur génie (2)". On sait la fortune du vers libre et à quel point nos poètes l'utilisèrent. La réforme prosodique est, sinon [588] un fait accompli, du moins passé en usage dans le lyrisme contemporain. La pensée ne doit plus s'astreindre à une forme poétique préétablie, mais créer son propre mouvement, son rythme exact, ses accents variés, ses temps forts et faibles qui dessinent sa grâce sinueuse et son dynamisme intérieur.
Un autre rapprochement s'impose: le goût commun des romantiques allemands et des symbolistes pour la légende, le folklore, la chanson populaire, la fable, ce que les poètes d'outre-Rhin nomment le Maerchen. Si ce dernier revêt de préférence le caractère du mythe platonicien chez Novalis et ses émules, le Maerchen emprunte davantage chez nos poètes son inspiration aux sources populaires, aux chants naïfs du Moyen Age ou de nos provinces. Ce qui, selon Schlegel, donnait le plus de valeur à la poésie antique, c'était la beauté des mythes qu'elle avait enfantés; et le poète qu'il prisait le plus depuis l'antiquité c'était Dante, à cause du merveilleux monde d'images et de légendes qu'il avait su créer (1) On trouvera dans le livre de M. Robert de Souza: la Poésie populaire et le lyrisme sentimental, l'essentiel des préoccupations lyriques de nos poètes modernes à ce sujet. Tous, plus ou moins, mais tous ont cru bon d'aller se retremper à la source du mythe populaire et d'y puiser une inspiration plus fraîche et plus libre. Alors que les parnassiens ne se servaient de ces légendes "que comme d'ornements agréables, sans avoir conscience de leur sens profond" (2), les symbolistes y ont découvert une précieuse mine de rêve, et de vérité sentimentale intense. L'humanité dans sa jeunesse fut attentive au mystère des choses, et ce mystère, ce sentiment de l'ineffable, elle l'exprima dans ses chansons souples, dans ses complaintes pleines de fraîcheur et d'âme. En retournant aux origines du lyrisme pur, dépouillé d'artifice, le symbolisme nous a libérés d'une poésie factice, nous a fait revivre des heures bienheureuses. L'illusion a extrait de l'Inconscient une poésie sentimentale et très prenante.
Il importe de signaler encore deux points de contact entre [589] la mentalité des romantiques allemands et celle des symbolistes, je veux parler de l'ironie et du sentiment religieux.
L'ironie est presque un dogme dans l'esthétique de Novalis et surtout chez Schlegel, elle fait partie intégrante du rêve, car "l'humour nous présente, dans un alliage imprévu, la nature mêlée à l'esprit, le conscient uni à l'automatique, tous deux à la fois contrastants et identiques". M. Spenlé ajoute: "L'ironie romantique, issue, comme le pessimisme, de l'idéalisme philosophique, est donc l'intuition d'une contradiction initiale de l'Etre, le sentiment de l'universelle illusion". Ne prenons pas le monde au sérieux, dit en substance Novalis, car il n'est qu'un ensemble de phénomènes, de symboles, derrière lesquels se cache la réalité. Il importe que l'artiste demeure au-dessus de son uvre, la domine, et qu'on sente qu'il joue. Si l'auteur des Disciples à Saïs s'est attaqué au Wilhelm Meister de Gœthe et a cru le dépasser par son Henri d'Ofterdingen, il a commencé par l'aimer passionnément. Ce qu'il admire tout d'abord dans le célèbre roman, c'est justement l'art de traiter avec la même ironie les faits vulgaires et les faits importants et d'employer une forme capricieuse et imprévue.
Victor Hugo, dans sa théorie du grotesque, n'a nullement pressenti ce genre d'humour où les larmes et le rire se mêlent de façon si vivante et cruelle. "L'humour, dit Hettner, est le plus bel enfant de la douleur et de la mélancolie." La génération symboliste a bien vu tout le parti à tirer de cette attitude curieuse et difficile à définir. Villiers de l'Isle-Adam, Rimbaud, Jules Laforgue, Verlaine et bien d'autres ont mêlé de façon étroite l'ironie au lyrisme et semblent donner raison à cette phrase de Tieck: "L'ironie est le parachèvement de toute uvre d'art, c'est cet esprit sublimé qui plane à l'aise sur le tout et joue librement avec lui." Mais si l'ironie allemande, comme toute l'esthétique d'outre-Rhin, repose sur une conception métaphysique, il faudrait peut-être chercher les causes de l'humour symboliste dans une réaction légitime contre le sentimentalisme veule de notre époque où les idées philanthropiques ont fait d'énormes ravages. "Pour éloigner le bourgeois, dit Jules Laforgue, se cuirasser d'un peu de fumisme extérieur", et le bourgeois c'est la société larmoyante contemporaine, cette "vaste entreprise de pâtes alimentaires", [590] c'est la démocratie humanitaire et bête, devant laquelle le poète a peur de s'abandonner. Ces causes de notre ironie actuelle seraient curieuses à approfondir. Notons seulement au passage la note très particulière, le son très neuf de cette ironie introduite dans notre lyrisme et faisant corps avec lui. Un excellent critique allemand, M. Paul Remer, nous dit M. Jean Thorel, dans une étude sur les tendances actuelles de notre littérature, a très bien établi la différence entre l'humour contemporain et l'ironie d'un Heine, par exemple. "Dans Heine, le sentiment, la fantaisie et l'ironie dominent chacun à son tour, l'un chassant l'autre; chez Laforgue, au contraire, les trois ennemis sont réconciliés et s'en vont constamment la main dans la main, sans qu'aucun cesse un seul instant de faire sa partie dans le concert de l'uvre."
Quant au sentiment religieux, on pressent que nous devions le retrouver chez les romantiques allemands et nos poètes contemporains, car il découle des principes que nous avons reconnus communs à ces deux générations. Une telle façon de concevoir le lyrisme: intuition, subjectivisme, évocation d'une réalité intérieure a de grandes ressemblances avec le phénomène psychologique décrit sous le nom de foi, et que certains auteurs ont défini un "état lyrique". Cette esthétique est propice aux élans de l'âme et développe chez l'artiste une sorte d'aspiration plus ou moins mystique.
On sait que, pour Novalis, l'intuition ou la foi surpasse en dignité la raison. Chaque romantique voulut avoir ses visions, ses extases, ses révélations. C'est le triomphe des sectes d'illuministes et d'ésotériques. L'influence de Boehme est palpable dans les uvres de la génération de 1795. Un mot résume ce mouvement idéaliste: la religiosité, qui éveille "la nostalgie de nous perdre et de nous dissoudre dans quelque chose de plus grand que nous". Schleiermacher, écrivait Novalis, "a annoncé une sorte d'amour de la religion, une religion esthétique, presque une religion à l'usage de l'artiste qui a le culte de la beauté et de l'idéal". De cette époque datent les Hymnes spirituelles de Novalis, les effusions de Schlegel, de Tieck et de Schelling, l'école allemande de peinture, dite école chrétienne, qui donne comme unique fondement à l'art l'inspiration, laquelle n'est possible qu'à ceux qui ont la foi.
Ce courant spiritualiste existe d'une façon caractérisée chez
[591] les symbolistes. Il serait facile de réunir mille traces de religiosité
dans les uvres de notre époque. Il suffit de rappeler les premiers ouvrages de
Mæterlinck, ses traductions de Ruysbroeck, son
Trésor des Humbles imprégné de
mysticité; les élévations spirituelles de Verlaine dans Sagesse; les prières
de Max Elskamp; l'Amour divin de Vielé-Griffin; l'ésotérisme d'un Villiers de
l'Isle-Adam, etc., autant de réalisations sur le plan sentimental des idées
esthétiques actuelles.
Ces quelques rapprochements entre les romantiques allemands et les poètes de la génération de 1885 aident à mieux saisir le parallélisme de deux esthétiques développées à près d'un siècle de distance. Il a fallu chez nous une double réaction: et contre le romantisme de 1830 trop superficiel, trop purement imaginatif, et contre l'attitude positiviste des parnassiens, pour amener notre poésie à une plus profonde compréhension des lois du lyrisme. Ainsi, l'histoire littéraire nous offre mille corsi et ricorsi entre le naturalisme et l'idéalisme interprétés selon le génie des races et le goût particulier des générations; de même qu'à une époque musicale où l'harmonie prédomine, succède une autre, amie de la mélodie. Chaque idéal d'art est représentatif d'une manière générale de penser. En s'acheminant dans la voie que nous avons indiquée, à la suite du romantisme allemand, mais en imprimant aux uvres le cachet de notre esprit national, le lyrisme contemporain dévoile tout un pan de l'âme moderne. L'avenir dira combien de temps durera et quelles uvres honoreront cette mentalité.
[Die Anmerkungen stehen als Fußnoten auf den in eckigen Klammern bezeichneten Seiten]
[579] (1) E. Spenlé: Novalis. Essai sur lidéalisme romantique en Allemagne, Hachette.
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[579] (2) Rouge: Frédéric Schlegel et la genèse du romantisme allemand, Fontemoing.
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[581] (1) H. Delacroix: Novalis. La formation de lidéal magique.
Revue de Métaphysique et de Morale, mars 1903.
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[582] (1) Joseph Texte: Études de littérature européenne, Colin.
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[583] (1) J. Texte, op. cit.., p. 231.
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[587] (1) Cf. E. Spenlé, op. cit., p. 84.
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[587] (2) Cf. Jean Thorel, op. cit., p. 105.
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[588] (1) Novalis écrit de son côté: "Le Maerchen est comme un rêve épars;
un ensemble de merveilleuses choses et d'événements, une fantaisie musicale,
les sons harmonieux d'une harpe d'Eole, la nature même." Il dit encore: "Alles
poetische muss mærchenhaft sein."
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[588] (2) Cf. A. Beaunier, la Poésie Nouvelle "Mercure de France", p. 22.
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Erstdruck und Druckvorlage
Mercure de France.
Bd. 88, 1910, Nr. 324, 16. Dezember, S. 577-591.
Gezeichnet: TANCRÈDE DE VISAN.
Die Textwiedergabe erfolgt nach dem ersten Druck
(Editionsrichtlinien).
Mercure de France online
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Mercure de France inhaltsanalytische Bibliographie
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Aufgenommen in
Werkverzeichnis
Visan, Tancrède de: Paysages introspectifs.
Poésies.
Avec un essai sur le symbolisme.
Paris: Jouve 1904.
URL: https://archive.org/details/paysagesintrospe00visa
URL: https://catalog.hathitrust.org/Record/001802621
Visan, Tancrède de: Sur l'œuvre de Francis Vielé-Griffin.
In: Vers et prose.
Bd. 1, 1905, März, S. 104-112.
URL: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34505309x/date
URL: https://catalog.hathitrust.org/Record/008745696
Visan, Tancrède de: Sur l'œuvre d'Henri de Régnier.
In: Vers et prose.
Bd. 2, 1905, Juni-August, S. 127-140.
URL: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34505309x/date
URL: https://catalog.hathitrust.org/Record/008745696
Visan, Tancrède de: Sur l'œuvre d'Emil Verhaeren.
In: Vers et prose.
Bd. 3, 1905, September-November, S. 98-112.
URL: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34505309x/date
URL: https://catalog.hathitrust.org/Record/008745696
Visan, Tancrède de: Sur l'œuvre de Maurice Maeterlinck.
In: Vers et prose.
Bd. 8, Dezember 1906 - Januar/Februar 1907, S. 82-93.
URL: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34505309x/date
URL: https://catalog.hathitrust.org/Record/008745696
Visan, Tancrède de: Ferdinand Bruntière.
In: Les Entretiens Idéalistes. Cahiers mensuels d'Art et de Philosophie.
1907, Nr. 4, [25. Januar], S. 145-150.
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Visan, Tancrède de: Notes sur Huysmans.
In: Les Entretiens Idéalistes. Cahiers mensuels d'Art et de Philosophie.
1907, Nr. 9, [25. Juni], S. 401-404.
URL: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34427890q/date
Visan, Tancrède de: Sur l'œuvre de Paul Fort.
In: Vers et prose.
Bd. 10, 1907, Juni-August, S. 94-112.
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Visan, Tancrède de:
L'Idéal symboliste.
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In: Mercure de France.
Bd. 68, 1907, Nr. 242, 16. Juli, S. 193-208.
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Visan, Tancrède de: Sur l'œuvre de Robert de Souza,.
In: Vers et prose.
Bd. 12, Dezember 1907 - Januar/Februar 1908, S. 110-132.
URL: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34505309x/date
URL: https://catalog.hathitrust.org/Record/008745696
Visan, Tancrède de: Maurice Barrès, professeur de lyrisme.
In: Mercure de France.
Bd. 77, 1909, Nr. 280, 16. Februar, S. 604-619.
URL: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34427363f/date
URL: https://catalog.hathitrust.org/Record/012224415
Visan, Tancrède de: La Philosophie de M. Bergson et le Lyrisme contemporain.
In: Vers et prose.
Bd. 21, 1910, Nr. 21, April-Juni, S. 125-140.
URL: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34505309x/date
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Visan, Tancrède de: Notes sur Jean Moréas.
In: Le Correspondant.
Bd. 82, 1910, 10. April, S. 175-184.
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Visan, Tancrède de:
Le Romantisme allemand et le Symbolisme français.
In: Mercure de France.
Bd. 88, 1910, Nr. 324, 16. Dezember, S. 577-591.
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Visan, Tancrède de: L'attitude du Lyrisme contemporain.
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Maurice Maeterlinck. – Paul Fort. – Adrien Mithouard. –
Robert de Souza. – Albert Mockel. – Maurice Barrès. –
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Edition
Lyriktheorie » R. Brandmeyer